L’un de mes créanciers est en mauvaise passe alors qu’une personne me fait parvenir ses aumônes afin que j’en assure la distribution comme je m’entend. M’est-il permis de prendre une partie des aumônes et la déduire du montant de ma dette à payer par le créancier? Ou faut-il informer le débiteur que j’ai défalqué des aumônes que je reçois le montant de la dette qu’il me doit? Ou ne m’est il pas du tout permis de prendre une partie quelconque de ces fonds?
Une personne en difficulté lui doit une dette alors qu’il dispose d’aumônes avec mandat de les distribuer et il se demande s’il lui est permis d’en prélever le montant de sa dette?
Question: 161871
Louanges à Allah et paix et bénédictions sur le Messager d'Allah et sa famille.
Louanges à Allah
Il est permis de remettre la zakat et l’aumône à autruiet de le mandater pour sa distribution aux pauvres et autres ayant droit. Onlit dans al-insaaf (3/197):«Il est permis dedonner procuration à quelqu’un pour distribuer la zakat. C’est juste. Mais lemandataire doit être sûr selon une précision faite par lui (c’est-à-direAhmad). Il doit encore être musulman, selon l’avis juste retenu dans ladoctrine (hanbalite).
Il est toutefois préférable que l’on s’occupepersonnellement de la distribution de sa zakat et ses aumônes. On lit dans al-Madjmou’ (6/138):«On peut donnerprocuration pour la distribution de la zakat qu’on a le droit de distribuersoi-même. S’il est permis de donner procuration à un autre pour l’assurer bienqu’il s’agisse d’un acte cultuel c’est parce qu’il ressemble par ailleurs aurèglement d’une dette et qu’on peut avoir besoin parfois de recourir à laprocuration à cause de l’absence des fonds ou pour d’autres raisons.
Toujours est-il qu’il est incontestablement préférable des’en occuper soi-même car on est plus sûr de l’état de distribution que si onavait à s’en fier à un mandataire.»
Cela étant, si quelqu’un vous a mandaté, ô auteur de laquestion, pour distribuer sa zakat ou ses aumônes aux pauvres ou à d’autresayant droits, votre devoir est de les leur faire parvenir. Il ne vous est paspermis de les garder pour vous faire payer vos dettes auprès des gens carl’objectif de la zakat ne se réalise que si on la remet directement auxpauvres. Cheikh Ibn Outhaymine dit dans son Tafsir (3/358): «L’aumône ne remplit sa fonctionqu’une fois parvenue au pauvres en vertu de la parole du Très-haut:..vous les donnez aux pauvres. Il en découle deux choses :la première est que c’est l’auteur de l’aumône qui doit lafaire parvenir au bénéficiaires. La seconde est que si on avait l’intention defaire de ses biens une aumônes puis revient sur cette idée, on en aurait ledroit car l’aumône ne serait pas encore parvenue au pauvre.»
Al-Mourdawi al-Hanbali dit dans al-Insaaf(3/234): «L’acquittement de la zakat est assorti de la condition d’enfairela propriétédu bénéficiaire. Aussi n’est-il pas permis dese contenter de les nourrir ou de les faire survivre.
Les ulémas ont précisé que si on a une dette auprès d’unpauvre on ne peut pas déduire le montant de la dette de sa zakat car celle-cidoit être donnée de manière à en faire la propriété du bénéficiaire.
Cheikh Abdoul Aziz ibn Baz(Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a été interrogé en ces termes: Siquelqu’un a une dette auprès d’un malade ou auprès d’un pauvre en difficulté, peut -il déduire le montant de la dette de sa zakat? Voicisa réponse:« Cela n’est pas permis car il faut accorder un délai au débiteur endifficulté jusqu’à ce qu’Allah lui facilite le paiement ( desa dette). C’est aussi parce que la zakat doit être mise à la disposition dubénéficiaire conformément à la parole d’Allah le Transcendant: Observez laprière et payez la zakat. Or la remise d’une dette contractée par un débiteuren difficulté n’est ni un don ni une mise en disponibilité (de fonds). C’est juste un acquittement qui vise plutôt à garantir larécupération de sa dette que de consoler le pauvre.
Vous pouvez cependant lui donner une partie de votrezakat à cause de sa pauvreté et de son besoin ou de son endettement. S’ilutilise une partie de ce qu’il a reçu pour régler sa dette, cela ne représenteaucun inconvénient, à condition de l’absence d’uncomplicité et d’une condition entendue entre vous et de la spontanéité de sonacte. Puisse Allah assister tous à avoir une bonne compréhension de la religionet la constance dans sa pratique.» Extrait des fatwa du Cheikh Ibn Baz (14/280).
S’il n’est pas permis au payeur de la zakat de défalquerdu montant à remettre au pauvre l’équivalent de la dette qu’il lui doit, quedire si le créancier n’a pas de zakat à payer et n’est qu’un mandataire desdonateurs de zakat pour en assurer la distribution? Il est plus éloigné de lapermission de se servir de la zakat (pour se faire payer une dette). Agir dansce sens consisterait purement et simplement à se rendre service soi-même.
Ilest connu quequand un débiteur est en difficulté, on doit lui accorder un délai en attendantqu’Allah lui facilite le paiement.A cepropos, Allah Très-haut dit: A celui qui est dans la gêne, accordez un sursis jusqu’àce qu’il soit dans l’aisance. Mais il est mieux pour vous de faire remise de ladette par charité! Si voussaviez!(Coran,2:280)
Cheikh Abdourrahman Saadi (Puisse Allah lui accorder Samiséricorde) dit: cela vaut dire: si le débiteur se trouve en difficulté et nepeut plus honorer ses dettes, son créancier a le devoir d’attendre qu’il soiten masure de payer sa dette. Le débiteur à son tour doitemployer tous les moyens licites pour honorersa dette. Si son créancierrenoncepartiellement ou entièrement à la dette , c’est bien.»Extrait du Tafsir de Saadi (p. 959).
En somme,il ne vous est pas permis de prendre une partie si infime soit elle de cesaumônes, que vous en ayez eu informé le pauvre ou pas et que le mandant l’aitautorisé ou pas. Bien plus, vous n’avez même pas le droit de lui donner unepartie des fonds pour qu’il vous les restitue ensuite car il reçoitles fonds à cause de sa pauvreté et son besoin. Vous avez toujours le droitd’exiger votre droit (la dette), si le débiteur n’est pas en difficulté.
Allahlesait mieux.
Source:
cheikh Muhammad ibn Outhaymine (Rencontre mensuelle 17)