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Réfutation de l’objection défendant la permission de travailler dans une banque usurière sous prétexte que le système financier contemporain fait qu’on ne peut pas ne pas traiter avec les usuriers

Question: 249923

Cette question est venue d’un frère qui veut une plus grande clarification au sujet de l’usure.

Je lui ai dit qu’il n’est pas permis de travailler dans les banques classiques car elles mènent des transactions usurières. Or, il n’est pas permis de s’entraider dans l’illicite.

Il a rétorqué qu’il est impossible d’éviter l’usure dans le système financier en vigueur. Ensuite, il a poursuit :

1. Supposons que vous employiez un ordinateur de marque Lenovo. Cette société emprunte de l’argent aux banques pour consolider ses finances. Puis elle utilise les prêts pour construire des usines, payer les salaires des fonctionnaires et couvrir ses autres dépenses. Les prêts assortis d’un taux d’intérêt constituent une assistance directe à la société.

2. Vous achetez un véhicule de marque Porsch. La compagnie emprunte de l’argent aux banques pour consolider ses assises financières. L’argent que vous payez est utilisé pour rembourser les intérêts des prêts. Vous apportez ainsi à Porsch une aide directe dans le paiement de ses prêts. Dès lors, s’il n’était pas permis de travailler dans les banques, il devrait être interdit d’acheter les marchandises ci-dessus citées.

Comment réfuter cet argument ?

Texte de la réponse

Louanges à Allah et paix et bénédictions sur le Messager d'Allah et sa famille.

Louanges à Allah

Premièrement, laproduction de l’usure relève des péchés majeurs. Elle est l’objet de gravesmenaces qui ne sont pas proférées à propos d’autres péchés. Allah a même menacéde faire la guerre à son producteur. Son Prophète (Bénédiction et salut soientsur lui) a prédit que la malédiction frapperait le producteur de l’usure et sonconsommateur. Ce qui est une terrible mise en garde contre la commission de cettepratique honnie.

Allah Très-haut dit :Ô vous qui croyez ! Craignez votre Seigneur et renoncez àtout reliquat d’intérêt usuraire, si vous êtes des croyants sincères ! Et si vous ne le faites pas, attendez-vous àune guerre de la part d’Allah et de Son Prophète. Mais si vous vous repentez,vos capitaux vous resteront acquis. Ainsi, vous ne léserez personne et vous neserez point lésés. (Coran, 2 :278-279). Mouslim(1598) a rapporté que Djaber (P.A.a)a dit : Le Messager (Bénédiction et salut soient sur lui) a maudit leproducteur de l’usure, son consommateur, celui qui enregistre et ceux qui entémoignent en disant qu’ils sont tous pareils. 

La souscription d’un prêtassorti d’un taux d’intérêt est interdite de l’avis de tous les ulémas. Al-Qourtoubi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) ditdans son Tafsir (3/241) :Les musulmanssont unanimes à avoir rapporté de leur Prophète (Bénédiction et salut soientsur lui) que formuler la condition de recevoir un surplus lors de l’octroi d’unprêt relève de l’usure, même si le surplus n’était qu’une poignée de fourrage,selon les termes d’Ibn Massoud, voire une seule graine. 

Il est interdit detravailler dans les banques usurières car l’agent ne pourrait échapper àl’enregistrement des opérations usurières, à leur attestation ou à lacontribution, d’une manière ou d’une autre, à leur déroulement.

Deuxièmement, il estpermis de faire des achats auprès d’une société qui mène des transactionsusurières de la même manière qu’il est permis de traiter avec un privé qui selivre à de telles opérations, à condition toutefois de la licéité de latransaction concernée. Le fait que la société ou l’Etat s’implique dans desactivités usurières ne nuit pas aux fonctionnaires. Il en suffit pour preuveque le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) et ses compagnonstraitaient avec les Juifs connus pour leur fréquent recours à la pratique del’usure dans leurs prêts et emprunts. Ils sont de grands usuriers d’après ceque le Très-haut dit d’eux : C’est en raison de leur iniquité et dugrand nombre de gens qu’ils ont détournés de la Voie d’Allah que Nous avonsinterdit aux juifs l’usage d’excellentes nourritures autrefois autorisées.C’est aussi à cause de la pratique de l’usure, bien qu’elle leur ait étéinterdite, et de leur habitude de s’accaparer injustement des biens d’autrui,que Nous avons préparé pour ceux d’entre eux qui sont infidèles de terriblestourments.  (Coran, 4 :160-161).

At-Tabarania rapporté que Kaab ibn Oudjara(P.A.a) a dit : «Je me suis rendu auprès duProphète (Bénédiction et salut soient sur lui) Le voyant éprouvé, je lui aidit :

Puisse mon père êtresacrifié pour te sauver, pourquoi tu parais si éprouvé ? 

Je n’ai rien avalédepuis trois jours. 

Repartis, j’ai eu lasurprise de tomber sur un juif qui abreuvait ses chameaux. Je lui ai proposé del’aider à condition de me donner une datte pourchaque sceau d’eau tiré du puits. J’ai pu ainsi gagner quelques dattes que jesuis allé offrir au Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui)

Où es-tu allé lestrouver ? 

Quand je lui ai dit, il arepris :

 Est-ce que tum’aimes, ô Kaab ? 

Oui, puisse mon pèresoit sacrifié pour te sauver ! 

La pauvreté gagnera ceuxqui m’aiment à une vitesse supérieure à celle des inondations convergent versleur point de rassemblement. Tu en seras éprouvé. Prépare-toi de quoi y faireface. Ce hadith est jugé bon par al-Albani dans Sahihat-targhib wa at-tarhib n° 3271.

Le terme tidjfaaf (traduit par de quoi y faire face)signifie linguistiquement le dispositif placé sur le dos d’un cheval qui peutcomprendre une arme et un équipement destiné à protéger l’animal contre lesblessures. Il renvoie ici à la résistance par rapport aux tentations mondaines,à s’en détourner et à endurer la pauvreté. L’usage du terme est une allusion àla patience qui dissimule la pauvreté de la même manière que le tidjfaaf couvre le dos du cheval. » Extraitd’an-Nihayah fii gharib al-hadith par Ibn Athir(1/475) et Gharib al-hadith d’Ibn al-Djawzi (1/163).

Le Prophète (Bénédictionet salut soient sur lui) mourut à un moment où son bouclier était mis en gageauprès d’un juif contre quelques mesures de blé.

Al-Bokhari (2916) a rapportéqu’Aicha (P.A.a) a dit : A son décès, leMessager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) avait mis son bouclieren gage auprès d’un juif contre 30 saa de blé (prèsde 70 kg.  Ce qui prouve qu’il est permis de faire des achats auprès desjuifs, bien qu’ils pratiquent l’usure.

Cheikh ibn Outhaymine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) adit : «Il est permis de faire des affaires avec un partenaire impliquédans l’usure à condition de s’y engager de manière saine. On peut, par exemple,sans aucun inconvénient, lui acheter (des marchandises) et lui emprunter del’argent car le prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) engageait destransactions avec les Juifs, bien qu’avides consommateurs des produits del’usure. Il a reçu leurs cadeaux, répondu à leur invitation et opéré achats etventes avec eux. La réception de leurs cadeaux s’illustra dans l’histoire de lafemme juive qui lui avait offert un mouton lors de la conquête de Khaybar. Laréponse à leur invitation a eu lieu suite à l’initiative d’un garçon juif deMédine. Il a acheté de la nourriture pour sa famille auprès d’un juif et lui aremis son bouclier en gage. A sa mort, le bouclier était encore entre les mainsdu juif.

En somme, il n’y a aucuninconvénient à traiter sainement avec quelqu’un qui réalise des gainsillicite. » Extrait de fatwa nouroune ala ad-darb.

Il est erroné de dire quetravailler pour des juifs ou faire des achats auprès d’eux revient à les aiderà mener leurs acticités usurières. En vérité, il ne s’agit que de traiter aveceux dans le cadre du licite. Coopérer avec eux dans ce cadre ne pose aucunproblème. Ce qui reste interdit est l’étroite coopération dans les opérationsillicites. L’assistance indirecte n’en fait pas partie. On pourrait dire, parexemple, que vendre de la nourriture à un mécréant revient à l’approvisionnerdonc à assurer sa survie et qu’en continuant à vivre il va perpétuer le cultedes idoles. Par conséquent son approvisionnement en nourritures revient àl’aider à perpétuer le chirk ! Cette approchen’est pas retenue par la Charia. C’est pourquoi les musulmans ont toujours opérédes achats, ventes et autres avec les polythéistes sans se soucier de cetteobjection.

Il est surtout interdit devendre à un désobéissant ce qui l’aide à persévérer dans la désobéissance.C’est le cas de la vente du raisin à celui qui va le transformer en vin ou lavente d’une arme tout en sachant ou en croyant fortement qu’elle va êtreutilisée pour tuer un innocent.

Ibn Qudama (Puisse Allahlui accorder Sa miséricorde) a dit :Pour tout dire,la vente du jus de raison à quelqu’un qui vale transformer en vin est interdit. Plus loin, il écrit : «Il en est ainsi de tout ce qui va fairel’objet d’un usage illicite comme la vente d’armes à des gens qui nous font laguerre ou à des coupeurs de route ou des gens impliqués dans un conflit ou lavente ou la location d’une esclave pour servir de chanteuse ou la mise enlocation d’une maison pour servir de débit de boisson ou être utilisée commeune église ou une maison du feu (lieu de culte mage) ou consort. Tout cela estinterdit et le contrat qui le sanctionne est caduc, comme nous l’avons déjàdit.

Selon Ibn Aquil, l’imam Ahmad (Puisse Allah lui accorder Samiséricorde) a précisé des questions et les a mises en relief. Il a dit àpropos du boucher et du boulanger que si leur client sait qu’ils boivent du vin,il ne doit rien leur acheter. Le fabriquant de coupes ne doit pas les vendre àcelui qui va les utiliser pour boire du vin. Il a interdit encore la vente desoie aux hommes mais il ne trouve aucun inconvénient à la vendre auxfemmes. » Extrait d’al-Moughni (4/254).

Cheikh al-islam Ibn Taymiyah (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde)dit : Il n’est pas juste de vendre un objet à quelqu’un qui va en faireun usage illicite. C’est le cas de la vente du jus de raisin à quelqu’un qui vale transformer en vin, selon la doctrine d’Ahmad et d’autres, si on sait oucroit fortement qu’il va en faire un tel usage. C’est un des deux avis émisdans l’école d’Ahmad. Cet avis est corroboré par les propos des condisciplesqui disent : si le bailleur croyait que le locataire louait la maison poury commettre des actes de désobéissance comme la vente du vin et consort, il nelui serait pas permis de lui louer la maison. La mise en location ne serait pasvalide. A cet égard, la vente et la location sont pareilles.  Extrait d’al-Fatwaal-koubra (5/388).

On lit dans l’encyclopédiejuridique :La majorité des jurisconsultes soutiennent que tout ce qui estdestiné à un usage interdit et toute manipulation qui aboutit à un tel usagesont interdits. Il faut s’abstenir de vendre un objet quand on sait quel’acheteur est animé d’un dessin non permis.  Extrait d’al-Mawsoua al-kowaytiyya (9/213).La location est comme la vente.

En somme, l’objection enquestion est faible. Elle vise à autoriser les transactions usurières sous prétextequ’on ne peut pas les contourner. C’est un embellissement et une brouillesatanique. A supposer que quelqu’un ait du mal à éviter certaines formesd’usure, qu’est ce qui l’autorise à en pratiquer d’autres volontairement ?Que faire de la parole d’Allah : Craignez Allah dans la mesure dupossible.  (Coran, 64:16).

C’est comme le cas decelui qui dirait : étant donné qu’acheter auprès d’un juif va luipermettre de bénéficier du prix et de l’utiliser dans sa pratique de l’usure,cela revient à l’y aider. Si c’est permis, pourquoi pas se livrer directementen coopération avec lui à des activités usurières ?!

Aussi devient il clairqu’il n’y a aucun inconvénient à mener des transactions licites en matièred’achat et de vente avec un usurier. Allah soit loué. Voir pour davantaged’informations au sujet de l’exercice d’un emploi au sein des banques usurièresla réponse donnée à la question n°26771.

Allah le sait mieux.

Source

cheikh Muhammad ibn Outhaymine (Rencontre mensuelle 17)

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