Il y a chez nous un établissement dont la mission consiste à accroitre les fonds d'orphelins placés sous la responsabilité du chef des juges et des tribunaux religieux. L'établissement s'occupe du développement des fonds par le biais de leur investissement dans des projets et par l'octroi de crédits. L'établissement procède comme suit: la personne désireuse d'acheter une marchandise quelconque (un appartement, un véhicule ou un terrain) choisit la marchandise à acquérir puis s'adresse à l'établissement. Celui-ci désigne l'un de ses agents pour aller constater la marchandise. Puis l'établissement l'achète avant de la vendre à la personne qui désire l'acheter. Cette dernière paie par tranches et concède un bénéfice (de l'ordre de 5% du prix). Cette vente est-elle susceptible en tant soit peu d'être entachée d'usure?
La vente dite mourabaha
Question: 81967
Louanges à Allah et paix et bénédictions sur le Messager d'Allah et sa famille.
Premièrement, la protection des orphelins et l'investissement de leurs fonds pour les accroitre à leur profit est une action bonne et utile. Nous demandons à Allah de réserver la meilleure récompense à ses initiateurs. C'est une forme de la prise en charge de l'orphelin à propos de laquelle le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui): «Celui qui prend en charge un orphelin sera avec moi au paradis comme ça (il fit un signe avec ses doigts indexe et majeur en les écartant légèrement.« (Rapporté par al-Bokhari,5304) et par Mouslim,2983).
An-Nawawi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit dans son commentaire sur Mouslim: «Celui qui prend un orphelin en charge est celui qui s'occupe de ses affaires en termes de dépenses vitales, de vêtements, d'éducation et de formation, et d'autres. Ce mérite est obtenu par celui qui utilise son propre argent au profit de l'orphelin ou l'argent de ce dernier sur la base d'une tutelle légale.«
On a rapporté à propos de l'usage des fonds de l'orphelin dans un commerce un hadithtransmis par Ibn Omar (P.A.a) en ces termes: «Fructifiez les biens des orphelins pour éviter qu'ils soient absorbés par la zakat.« Cité par dar al-Qoutni et par al-Bayhaqui qui en dit: «Sa chaîne de transmission est sûre et d'autres versions reçues d'Ibn Omar (P.A.a) la corrobore. Des versions attribuent le contenu du hadith tantôtdirectement au Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) tantôt l'attribue à Ibn Omar. Voir al-Ilal (3/258).
Deuxièmement, le cas de figure objet de la présente question est appelée par les ulémasla mourabaha. Elle consiste à ce qu'un homme qui désire acquérir une marchandise se présente à une personne physique ou morale (établissement ou banque) pour désigner la marchandise à acquérir en en précisant les caractéristiques et promet de l'acheter une fois acquise par la personne physique ou morale, quitte à consentir un bénéfice à fixer d'un commun accord. Cette opération n'est permise qu'à la réunion de deux conditions.
La première est l'acquisition de la marchandise par l'établissement avant de la revendre. Il faut que la personne physique ou morale acquièrent effectivement l'appartement, le véhicule avant de les revendre à celui qui désir les acquérir.
La seconde est la réception de la marchandise par l'établissement avant de la revendre au client. La réception se conçoit par rapport à la disposition de la chose perçue. La perception d'un véhicule consiste par exemple à le déplacer du lieu de vente. La perception d'une maison consiste à la faire libérer et à en prendre les clés, etc.
Si l'opération ne remplit pas ces deux conditions ou l'une des deux, elle reste interdite. En voici l'explication: si la banque ou l'établissement ne se procure pas réellement la marchandise à travers un achat effectif, si elle n'a fait que remettreau client un chèque correspondant au montant du prix de la marchandise en lieu et place de celle-ci, c'est alors un créditusurier car on n'a fait que prêterau client le prix de la marchandise (cent mille par exemple) à condition de se faire payer cent sept mille). Si la banque achète une marchandise mais la revend avant même de la percevoir, cette opération serait contraire à la parole du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) adressée à Hakim ibn Hizam: Quand tu achètes une marchandise ne la revends pas avant de la percevoir. (Rapporté par Ahmad (15399) et par an-Nassai (4613) et jugé authentique par al-Albani dans Sahih al-Djaami (342).
Ad-Daraqoutni et Abou Dawoud (3499) ont rapporté d'après Zayd ibn Thabit (P.A.a) que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a interdit la vente des marchandises immédiatement après leur achat et avant que les commerçants concernés ne lesréceptionnent.» Ce hadith est jugé bon par al-Albani dans Sahih Abou Dawoud.
On trouve dans les deux Sahih un hadith d'Ibn Abbas (P.A.a) selon lequel le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit: Que celui qui achète de la nourriture ne la revende pas avant de la réceptionner. (Rapporté par al-Bokhari (2132) et par Mouslim (1525). Ce dernier ajoute: Ibn Abbas a dit : je crois qu'il en est de même pour toute autre chose. Autrement dit , il n' y a pas de différence entre la nourriture et le reste. La réception, comme nous l'avons déjà dit, se conçoit par rapport à la disposition de la chose perçue.
Cheikh Ibn Outhaymine (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) Ce qui est déplaçable comme les vêtements, les animaux, les véhicules et d'autres choses pareilles peuvent être perçues en les déplaçant car la coutume veut qu'il en soit ainsi. Extrait d'acharh al-moumt'i (8/381).
On trouve dans une fatwa de la Commission permanente (13/153): Si un homme demande à un autre de lui acheter un véhicule spécifié ou décrit précisément et promet de l'acheter une fois acquis parson interlocuteur et si ce dernier achète le véhicule et le réceptionne, ilest permis dès lors à celui qui l'a fait commander de l'acheter soit au comptant ou par tranches, quitte à concéder un bénéfice déterminé. Cette opération ne consiste pas à vendre ce que l'on ne possède pas car celui auquel on fait commander une marchandise ne la revend qu'après l'avoir achetée et réceptionnée. Il n'a pas à la vendre à sonami, par exemple, avant de l'acheter ou après l'avoir achetée sans la réceptionner car le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a interdit la vente de marchandise immédiatement après leur achat et avantque les commerçants ne les réceptionnent.
L'académie islamique de la jurisprudence a pris une résolution allant dans le sens de l'autorisation de la vente en question sous la forme ainsi décrite. On lit dans la résolution: la vente assortie du versement d'un bénéfice par celui qui a commandé la marchandise portant sur un bien effectivement disponible auprès du fournisseur est permise puisque ce dernier reste responsable de toute perte survenue avant la livraison de la marchandise au client. Il en de même du rejet de la marchandise en raison de l'existence d'un défaut caché ou d'autres facteurs justifiant le rejet d'une marchandise réceptionnée. Il faut en plus que les conditions de la vente soient respectées et ses interdits soient évités.» Extrait de la revue al-Moudjtama' (5/2/753,965).
Cela étant, si l'établissement en question achèteréellement mais pas fictivement (parce que sur papier seulement) des marchandises et les réceptionnent avant de les revendre, la vente est juste. Cette opération est permise.
Allah le sait mieux.
Source:
Islam Q&A