J'ai eu une discussion avec mon frère sur l'affection nourrie envers les Gens du livre. Je lui dis que cela n'est pas permis. On ne peut pas les prendre pour amis ni les traiter avec courtoisie pendant leurs fêtes ni même être le premier à les saluer quand on les rencontre, entre autres gestes d'amitié. Il m'a opposé l'argument selon lequel Allah nous a autorisé à épouser des femmes issues d'eux et inspiré amour et compassion aux époux.
J'espère recevoir de votre éminence une réponse exhaustive et satisfaisante de nature à concilier l'adoption du dogme relatif à l'alliance et la rupture et l'amour pour l'épouse chrétienne ou juive?
Comment concilier la licéité d’épouser une chrétienne ou une juive et l’adoption du dogme relatif à l’alliance et la rupture?
Question: 154606
Louanges à Allah et paix et bénédictions sur le Messager d'Allah et sa famille.
Premièrement, nous avons déjà expliqué dans les réponses données à la question n° 2527 les conditions que la femme juive ou chrétienne doit remplir pour qu'un musulman puisse l'épouser.
Deuxièmement, il y a généralement deux sortes d'affection: une affection religieuse et affection naturelle. La première est tantôt obligatoire tantôt interdite, voire une forme du chirk. On en trouve les détails dans la réponse donnée à la question n° 276.
Quant à l'affection naturelle ou instinctive, c'est celle innée chez l'homme comme l'amour de la boisson fraiche et l'amour pour l'argent. L'amour des parents , des enfants et des proches parents relève de cette sorte d'amour qui ne nous rapporte aucune récompense en principe. Si toutefois on l'exagère au détriment de sa foi et au point de violer la loi de son Maître et devenir 'l'esclave' du dinar ou donner la priorité à l'obéissance à son père sur l'obéissance à Son Maître, etc., on tombe dans lé péché.
Ibn al-Qayyim (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) dit: «Il est rapporté de façon sûre dans le Sahih qu'il (le Prophète) a dit: Aucun de vous ne croira aussi long temps qu'il ne m 'aimera pas plus que ses enfants, son père et tous les autres. Ce hadith évoque les trois sortes d'amour. En effet, l'amour est soit un amour de vénération et de magnification comme celui qu'on voue au père, soit un amour marqué par la douceur et la tendresse comme celui qu'on manifeste à l'endroit de son enfant, soit un amour dû à la bienfaisance et à des qualités parfaites comme l'amour que les gens les uns envers les autres. Aucun fidèle ne croira (vraiment) jusqu'à ce que son amour pour le Messager d'Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) soit plus fort que toutes ces sortes d'amour.» Extrait de Djalaa al-afhaam (1/391-392).
L'amour éprouvé par les époux, l'un envers l'autre, est naturel. Ce qui écarte l'ambigüité qui suscite la question de l'honorablefrère. L'amour normal que les époux ressentent l'un envers l'autre ne s'accompagne pas nécessairement de l'affection et de l'amour fondé sur la religion. Aussi, peut on ne pas apprécier la foi de son épouse tout aimant sa personne, deux choses qu'on peut bien distinguer.
En effet, l'âme humaine éprouve un amour naturel pour les pères, les mères , les enfants et les épouses. Pourtant il est interditde nourrir de l'affection envers les mécréants hostiles à l'islam et engagés en guerre contre lui, quelque soit le degré de parenté qui nous lie à eux. C'est à ce propos que le Très-haut dit: Tu n'en trouveras pas, parmi les gens qui croient en Allah et au Jour dernier, qui prennent pour amis ceux qui s'opposent à Allah et à Son Messager, fussent-ils leurs pères, leurs fils, leurs frères ou les gens de leur tribu. Il a prescrit la foi dans leurs cœurs et Il les a aidés de Son secours. Il les fera entrer dans des Jardins sous lesquels coulent les ruisseaux, où ils demeureront éternellement. Allah les agrée et ils L'agréent. Ceux-là sont le parti d'Allah. Le parti d'Allah est celui de ceux qui réussissent. (Coran,58:22).
L'une des grandes règles de la loi religieuse est de ne rien imposer qui soit au dessus de la capacitéde l'individu. L'humain peut bien séparer l'amour naturel et l'amour fondé sur la religion. Allah Très-haut a évoqué l'hostilité qu'Abraham et les croyants qui l'avaient rejoint nourrissaient envers leurs peuples mécréants qui comprenaient leurs proches parents auxquels un amour naturel les liaient encore: Certes, vous avez eu un bel exemple (à suivre) en Abraham et en ceux qui étaient avec lui, quand ils dirent à leur peuple: "Nous vous désavouons, vous et ce que vous adorez en dehors d'Allah. Nous vous renions. Entre vous et nous, l'inimitié et la haine sont à jamais déclarées jusqu'à ce que vous croyiez en Allah, seul. (Coran,60:4).
Allah Très-haut a confirmé l'amour que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) nourrissait envers son oncle paternel en dépit de sa mécréance. Tu (Muhammad) ne diriges pas celui que tu aimes: mais c'est Allah qui guide qui Il veut. Il connaît mieux cependant les bien-guidés. Cet amour là était naturel parce que dû à la parenté.
Cheikh Salih al-Fawzan (Puisse Allah le protéger) dit:« Allah a révélé à propos du cas d'Abou Talib: Tu (Muhammad) ne diriges pas celui que tu aimes. Toi , Messager, tu ne diriges pas celui que tu aimes: tu ne maîtrises pas la direction (des hommes) de manière à pouvoir en faire profiter celui que tu aimes parmi tes proches ,notamment ton oncles paternel. L'amour en question ici est celui naturel non celui fondé sur la religion, ce dernier ne pouvant pas profiter à l'idolâtre , fût-il un proche parent: Tu n'en trouveras pas, parmi les gens qui croient en Allah et au Jour dernier, qui prennent pour amis ceux qui s'opposent à Allah et à Son Messager, fussent-ils leurs pères, leurs fils, leurs frères ou les gens de leur tribu.. (Coran,58:22). Il n'est pas permis de faire profiter au non musulman l'amour fondé sur la religion. Quant à l'amour naturel, il n'a rien à voir avec les affaires religieuses.» Voir iaanatoulmoustafid bi charhi kitaabi tawhiid (1/356).
Cheikh Abdourrahman al-Baraak (Puisse Allah le protéger ) a ramassé tout cela dans une pertinenteréponse à cette question formulée comme suit:«L'amour s'exprime sous deux formes: une forme naturelle comme l'amour qu'on éprouve envers son épouse, son enfant et ses biens. C'est celui évoqué dans la parole du Très-haut: Et parmi Ses signes Il a créé de vous, pour vous, des épouses pour que vous viviez en tranquillité avec elles et Il a mis entre vous de l'affection et de la bonté. Il y a en cela des preuves pour des gens qui réfléchissent. (Coran,30:21).
La forme religieuse est celle vouée à Allah et à Son Messager, et comme le fait d'aimer ce qu'ils aiment en fait d'actes , de paroles et de personnes. Allah Très-haut dit: Allah va faire venir un peuple qu'Il aime et qui L'aime.. (Coran,5:54). Le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) dit: Dansl'affection, la compassion et la tendresse qu'ils se vouent mutuellement, les croyants sont comme un seul corps….
Aucun lien nécessaire n'existe entre les deux formes d'amour. En d'autres termes, l'amour naturel peut cohabiter avec une hostilité religieuse puisqu'on peut aimer ses père et mère polythéistes tout en les haïssant en Allah (parce qu'Allah les hait), ce qui n'exclut pas l'affection naturelle qu'on leur voue. En effet, l'être humain aime naturellement ses père et mèreet proches. Le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) aimait son oncle paternel en raison de la proche parenté qui les liait et en dépit de sa mécréance. C'est à ce propos que le Très-haut dit: Tu (Muhammad) ne diriges pas celui que tu aimes: mais c'est Allah qui guide qui Il veut. Il connaît mieux cependant les bien-guidés. (Coran,28:56).
Relève de cette forme d'amour celui que l'on éprouve envers son épousechrétienne ou juive. On doit la haïr religieusementen raison de sa mécréance, ce qui n'empêche pas qu'on éprouve à son égard le sentiment qu'unhomme éprouve envers sa femme. Aussi, l'épouse chrétienne ou juive peut elle être aimée d'un côté et haie de l'autre. Ce qui arrive fréquemment. La désapprobation naturelle et l'amour religieux se retrouvent dans le djihad car il est naturellement réprouvé mais aussi aimé compte tenu de l'ordre divin dont il est l'objet et vu ses retombées louables ici-bas et dans l'au-delà. C'est dans ce sens que le Très-haut dit: Le combat vous a été prescrit alors qu'il vous est désagréable. Or, il se peut que vous ayez de l'aversion pour une chose alors qu'elle vous est un bien. (Coran,2:216).
De cette forme d'amour relève encore celui que le musulman ressent envers son coreligionnaire coupable d'une injustice à son détriment. Il continue de l'aimer en Allah tout en le haïssantà cause de son injustice. Même l'amour naturel peut cohabiter avec la réprobation naturelle dans le cas du remède amer. Le patient le trouve repoussant à cause de son goût amermais le prend malgré cela parce qu'il l'espère efficace.
De même l'amour fondé sur la religion peut cohabiter avec la hainefondée sur la même considération dans le cas du mauvais musulman. On l'aime parce qu'il est un croyant et le haït pour ses actes de désobéissance.Le vrai sage est celui qui examine à la lumière dela loi religieuseet avec un esprit impartial ce qu'il faut aimer ou détester.
Allah le sait mieux.
Source:
Islam Q&A
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