Etant jeune, il m’arrive de dire: O Muhammad! O Ali! Seigneur unTel! Quelqu’un m’a dit que cela relève du chirk. Je lui ai dit que je n’associais personne ( à Allah). J’atteste qu’il n’ y a pas de dieu en dehors d’Allah et j’atteste que Muhammad, Ali et mon seigneur unTel ne sont pas des dieux aux côtés d’Allah. J’ai vu le hadith d’un compagnon concernant un homme qui avait eu une crampe au mollet et auquel on a demandé de mentionner le nom de la personne qu’il aimait le mieux. Il a mentionné Muhammad et sa crampe cessa. Lors d’une des batailles menées par les musulmans, ces derniers avaient pour slogan: O mon Muhammad! Si cela relevait du chirk, pourquoi les compagnons ne les leur avaient pas interdits? Les frères de Joseph ont dit : père, demande pour nous le pardon de nos péchés au lieu de dire: O Allah, pardonne -nous. Accorde-nous le pardon? Si cela relève du chirk pourquoi ne leur on pas dit que c’était une erreur?Est-ce que je suis maintenant l’auteur d’un chirk ou pas? Si je le suis, Allah le Transcendant et très-haut pardonnera-t-Il à celui qui baigne dans le chirk?
Le fait de dire O Muhammad! O mon Muhammad! relève-t-il du chirk (polythéisme)
Question: 250434
Louanges à Allah et paix et bénédictions sur le Messager d'Allah et sa famille.
Premièrement, le fait de dire O Muhammad! O Ali! peutêtre interprétéde deux manières. La première consiste àdire qu’il s’agit de se représenter l’image de l’interlocuteur sans rien lui demander. C’est le cas de celui qui dit: O Muhammad ! puis se tait ou celui qui dit:O Muhammad! Puisse Allah répandre Sa bénédiction sur toi. Ceci ne constitue pas un chirk car il ne revient pas àinvoquer un autre aux côtés d’Allah Très-haut. Cheikh al-islam Ibn Taymiyyah (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit: « Le fait de dire: « O Muhammad , prophète d’Allah est une interpellation qui a pour objectif de se représenter l’image de l’interpellédans le coeur. Son auteur s’adresse àlui une fois présent dans son coeur. C’est comme le prieur qui dit : salut , miséricorde et bénédictionàtoi, o Prophète. L’homme se retrouve souvent dans une telle situation et s’adresse àun personnage qu’il se représente àl’esprit et qui n’est pas physiquement présent pour écouter son discours. »Extrait de Iqtidahh as-sirat al-moustaquim li moukhalafati ashab al-djahim (2/319)
La deuxième consiste àestimerque cette interpellation comporte une demande claire exprimée en ces termes: o Muhammd! Fais ceci ou cela pour moi ou consiste encore àformuler une demande implicite comme dans le cas d’une personne qui transporte un morceau de pierre ou un objet lourd et dit: o Muhammad! C’est une manière de solliciter son secours. Ce qui revient àassocier le sollicitéàAllah Très-haut.En effet, invoquer un autre qu’Allah parmi les défunts et les absents revient àles associer àAllah d’après les textes (sacrés) et le consensus. A ce propos le Très-haut dit: « Quel pire injuste, que celui qui invente un mensonge contre Allah, ou qui traite de mensonges Ses signes? Ceux làauront la part qui leur a étéprescrite; jusqu’au moment oùNos Envoyés [Nos Anges] viennent àeux pour leur enlever l’âme, en leur disant: Oùsont ceux que vous invoquiez en dehors d’Allah?– Ils répondront: Nous ne les trouvons plus. Et ils témoigneront contre eux-mêmes qu’ilsétaient mécréants. »(Coran, 7:37) Il dit encore: et n’invoque pas, en dehors d’Allah, ce qui ne peut te profiter ni te nuire. Et si tu le fais, tu seras alors du nombre des injustes»(Coran,10:106). Le transcendant dit ailleurs: Quand ils montent en bateau, ils invoquent Allah Lui vouant exclusivement leur culte. Une fois qu’Il les a sauvés [des dangers de la mer en les ramenant] sur la terre ferme, voilàqu’ils [Lui] donnent des associés.(Coran,29:65) Ici, l’association consiste àinvoquer autre que Lui. Il dit encore: Et quiconque invoque avec Allah une autre divinité, sans avoir la preuve évidente [de son existence], aura àen rendre compte àson Seigneur. En vérité, les mécréants, ne réussiront pas. (Coran,23:117). Voilàune disposition générale qui s’applique àtoute personne qui invoque un autre qu’Allah. Peu importe qu’il appelle l’invoquédivinitéou seigneur ou saint ou pôle. Le terme ilaah désigne linguistiquement l’adoré. Celui qui adore un autre qu’Allah en fait son ilaah, même si il le conteste verbalement. D’autres nobles et clairs versets abondent dans le même sens.
Al-Bokhari (4497) cite dans son Sahih que le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit: Celui qui meurt alors qu’il invoque un autre en-dehors d’Allah quelqu’un qu’il considère comme son égal entrera en enfer. .
Les ulémas ont rapportéqu’un consensus s’était dégagésur l’infidélitéde celui qui désigne des intermédiaires entre lui et Allah qu’il sollicite et invoque. Ils n’ont reconnu aucune exception àcette règle ni pour le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) ni pour un autre. Cheikh al-islam, Ibn Taymiyah (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) a dit: Celui qui désigne les anges et les prophètes comme des intermédiaires (entre lui et Allah), les invoque, se fie àeux et leur demande de lui procurer des avantages comme le pardon des péchés et la bonne orientation des coeurs, la dissipation des soucis et l’assouvissement des besoins ou de lui éviter des préjudices , celui-làest un mécréant de l’avis unanime des musulmans. Extrait de Madjmou al-fatawa,1/124). Ce consensus a étérapportépar un nombre d’ulémas qui l’ont confirmé. Voir àce propos al-fourou’ d’Ibn Mouflih, 6/166; al-insaaf, 10:327; kashshaaf al-quinaa,6/169; Mataalib ouli an-nouha,6/279.
Après avoir évoquéledit consensus , l’auteur de kashshaf al-quinaa dit dans le chapitre sur l’apostasié: « c’est qu’il a agi àl’instar des adorateurs des idoles qui disent : nous ne les adorons que pour qu’elles nous rapprochent bien àAllah.
Deuxièmement, on ne trouve ni dans le Livre ni dans la Sunnah un élément permettant d’augmenter justement cette pratique entachée de chirk ou àplus forte raison de la prêcher ou prôner. Comment pourrait-il en être autrement pour une chose dont Allah a fait un chirk et une mécréance affirmée dans Son livre inaltérable! Comment pourrait-on rendre cela licite?
Ce que vous avez évoquéàpropos de la crampe au mollet d’un homme ne repose pas sur une chaîne authentique. Et même si la chaine était authentique, le hadith ne saurait servir d’arguent car il ne s’agirait que de se représenter l’image de l’interlocuteur. On n’y trouve aucune demande adressée àun autre qu’Allah. (On a déjàparléexhaustivement de cette tradition dans le cadre de la réponse donnéeàla question n° 162967.
Troisièmement, le slogan O Muhammad! ou O mon Muhammad n’a pas étéscandépar les compagnons lors de leurs batailles comme nous le verrons plus tard. A supposer qu’ils l’aient fait, il ne s'agissait pas de solliciter ou demander un secours. Car aucune demande n'y apparait. C’est juste une interpellation employée en cas de souffrance. C’est comme si les musulmans l’employaient pour se remonter le moral et regretter la perte du messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) . C’est dans le même sens qu’ils disaient : o mon islam pour s’apitoyer sur le sort subi par la religion. Cette sorte d’interpellation s’exprime grâce àl’usage de la lettre waaw et dela lettreyaa quand cela n’entraîne aucune confusion. C’est àpropos de cette règle grammaticale qu’Ibn Malck dit dans son pèle de mille vert:
la waaw et la yaa sont àutiliser par celui qui exprime une interpellation d’apitoiement
en cas de risque de confusion, l’usage de la waaw est àéviter.
Pour al-Ashmouni, on utilise lawaaw dans une interpellation d’apitoiement ou de détresse en disant par exemple: waa waladaah: o fils! yaa ra’saah: o ma tête! On peut aussi employer le yaa en disant yaa waladah:o fils ! yaa ra’ssah: o ma tête. Mais ce dernier usage n’est permis qu’en l’absence d’un risque deconfusion.
Autrement dit, il ne faut utiliser le yaa que quand son emploi ne prête aucune confusion. L’exemple en est donnédans ce vers:
« On t’a donnéune importante charge que tu as bien supportée
car tu l’a gérée conformémentàl’ordre d’Allah, ôOmar! »
Quand on craint un risque de confusion, l’usage de la waaw s’impose. »Extrait de charh al-ashmouni sur al-alfiyyahd’in Malick (1/233) C’est comme cette parole prononcée par Fatimah lors du décès de l’Elu (Bénédiction et salut soient sur lui): yaa Abataahadjaaba rabban da’aah (O père)!Tu as répondu àl’appel d’Allah. Une autre version dit: Waa abataahadjaaba rabban da’aah!(O père)!Tu as réponduàl’appel d’Allah. (Rapportépar al-Bokhari (4462). Anas a dit: Quand la souffrance du Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) commença às’accentuer, Fatimah (PS) disait : waa karbaah: quel malheur pour moi. A quoi l’agonisant répondit: plus de chagrin pour ton père àpartir de ce jour.
Quand il décéda, elle dit: waa abataah, adjaaba rabban da’aah man djannatil firdawsi maa’waah,yaa abataah il djibril nan’aah: o père! tu as réponduàl’appel du Maître.Le paradis supérieur est ta destination. O père! Nous annonçons ton décèsàGabriel. »Une fois enterré, Fatimah (PS) dit: Anas! Vous enterrez le Messager d’Allah (Bénédiction et salut soient sur lui) en toute tranquillité?!
Selon la version d’Ibn Madjah (1630): waa abatah, ilaa djibraila an’aah,waa abatah min rabbihii ma adnaa waa abataah, djannatoul firdawsi maawaa, waa abatah adjaaba rabban d’aaaou: O père! Nous annonçons ton décèsàGabriel! O père! Que tu es proche de ton Seigneur! O père, ta destination est le paradis supérieur. O père! Tu as réponduàl’appel de ton Seigneur.Ces paroles relèvent de l’interpellation exprimant la détresse et nonla sollicitation d’un secours.
Al-Hafezh Ibn Hadjar a dit: En disant yaa abataah (o père!) elle fait comme si elle disait :yaa abii (o père!) car les points diacritiques ne font que passer du haut en bas alors que la lettre alif donne une tonalitéde détresse et permet de prolonger la haleine et la haa marque la baisse de la voix. Extrait de Fateh al-Bari (8/149)
Toujours est-il que l’usage dudit slogan n’a pas étévérifiécomme nous l’avons déjàévoqué.
Cheikh Salih Aal Cheikh (Puisse Allah le protéger) a dit dans une réponse: Al-Hafez Ibn Kathir a dit que le slogan des musulmans lors de la bataille de Yamamahétait: O Muhammad. Je dis: Ibn Kathir (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde a prononcéces propos dans le cadre d’une long récit relatif àcette invasion. Des versions de différents informateurs s’y interfèrent. Quant au slogan (en question) Ibn Djarir nous en parle dans Tarikh al-Moulouk (3/293) en ces termes: « As-Sari m’a fait parvenir un écrit reçu de Chouayb qui l’avait reçu de Sayf lui – même l’ayant reçu d’ad-Dhahak ibn Yarbou’auquel il avait ététransmis par son propre père qui l’avait reçu d’un homme du clan Souhaym…Puis il relate le récit comprenant le slogan.. Quant àmoi, je dis que cette chaine est obscure. A ma connaissance, les questions abordant le dogme et l’unicitéd’Allah et les autres portant sur les dispositions de la charia ne sont pas àchercher dans les livres de l’histoire. Les récits historiques sont rapportés pour servir de leçonsàméditer. On peut les retenir dans leur ensemble et non dans leurs détails. C’est dans ce sens qu’Ahmad ibn Hanbal dit :«Trois sont sans fondement"…Plus loin il cite les récits portants sur les expéditions guerrières"
L’obscuritéde la chaîne résultent de trois considérations.
La première est que Sayf Ibn Omar est l’auteur des ouvrages al-Foutouh et ar-Riddah. Il y transmet des informations reçues d’un bon nombre d’inconnus. Adh-Dhahabi dit dans Mizan al-I’tidaal (2/255): « Moutayyin a rapportéde Yahya (àpropos de Sayf): il vaut moins qu’un sou! Dawoud lui dit: Il n’est rien. AbouHatim dit: Il est abandonné. Pour Abou Hayyan: Il est accuséd’athlétisme. Pour Ibn Ady: La plupart de ses hadiths sont contestables.
La deuxième concerne ad-Dhahhak ibn Yarbou’. Al-Azdi dit de lui: « Ses hadiths ne tiennent pas debout. Je dis qu’il fait parti des inconnus auprès desquels seul Sayf a reçu des informations.
La troisième est que Yarbou’et l’homme issu du clan Souhaym sont des inconnus.
Chacune de ces trois sources d’incertitudes et défauts affaiblit le hadith. Et que dire quand on sait que seul Sayf ibn Omar , dont vous savez le statut, l’a rapporté? Nous demandons àAllah la paix intérieure.
On ne s’étonne guère qu’Ibn Djarir raconte de telles histoires peu sûres et que d’autres historiens les relaient. Ibn Djarir (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde) écrit dans l’introduction de son ouvrage intituléTarikh al-umam wal- moulok(1/8): S’agissant de ce que l’on trouve dans mon présent ouvrage en fait d’informations reçues des anciens et susceptibles d’être mal reçues par le lecteur et inacceptable pour celui qui l’entend puisque l’un et l’autre ne lui trouent aucun fondement juste ni un sens vrai, que l’on sache alors que ce n’est pas àmoi qu’il faut s’en prendre car jene fais que rapporter ce que j’ai reçu auprès d’autres comme il m’a ététransmis. Extrait de Hadhihii mafaahiimounaapar Cheikh Salih Aal-Cheikh p.52.
Quatrièmement , la parole du Très-haut concernant les frères de Joseph: « Ils dirent: Ônotre père, implore pour nous la rémission de nos péchés. Nous étions vraiment fautifs.Il dit: J’implorerai pour vous le pardon de mon Seigneur. Car c’est Lui le Pardonneur, le Très Miséricordieux.(Coran,12:97 et 98) est une demande d’invocation émanant d’un être vivant capable lui-même d’accomplir l’acte. Ce qui ne représente aucun inconvénient àl’avis de tous. Leur parole: implore pour nous ….signifie : demande le pour nous. Ils n’ont pas dit: "pardonne -nous "comme vous l’avez compris par erreur.
Des arguments indiquent qu’il est permis de solliciter une invocation auprès de quelqu’un. Parmi ces arguments figure le long hadith d’Ouways al-Qarni selon lequel le Prophète (Bénédiction et salut soient sur lui) a dit àOmar: ..Si tu peux lui demander de solliciter le pardon (divin) pour toi, fais -le. Omar se rendit auprès d’Ouways et lui dit: Sollicite le pardon (divin) pour moi. (Rapportépar Mouslim,2542)
An-Nawawi (Puisse Allah lui accorder Sa miséricorde ) a dit: Chapitre sur la recommandation de la demande d’invocation auprès des vertueux même si le demande émanait de quelqu’un de plus vertueux que sa destinataire etsur l’invocation effectuée en des endroits nobles Sachez que les hadiths relevant de ce chapitre sont trop nombreux pour être recensés. Ce qui est admis àl’unanimité. »Extrait de al-adhkaar,p.643.
Il découle de ce qui précède que le fait de dire : O Muhammad (Bénédiction et salut soient sur lui) est en principe permis àmoins qu’il ne s’agisse de formuler une demande explicite ou implicite car dans ce cas ce serait du chirk.
Nous vous en conseillons pas moins d’éviter le fréquent emploi d’une telle formule pour deux raisons. La première est qu’on pourrit penser du mal de vous et croire que vous adressez une demande àun autre en dehors d’Allah. La seconde est que vous pouvez finir par en avoir l’habitude et vous y livrer pendant vos travaux et chaque fois que vous avez besoin d’une assistance. Or vous devriez habituer votre langue àYaa Allah, yaa hayy, yaa Qayyoum, yaa dhal dhallal wal ikram : O Allah,O Le Majestueux et Généreux, O Le vivant O Le Celui qui dépend de Lui-même. »En effet, rien n’est plus ennoblissant pour un fidèle serviteur que de solliciter son Maître et se montre humble en face de Lui et de l’Invoquer dans tous ses états.
Cinquièmement, celui qui tombe dans le chirk et se repent obtient le pardon d’Allah selon ces propos du Très-haut: Qui n’invoquent pas d’autre dieu avec Allah et ne tuent pas la vie qu’Allah a rendue sacrée, sauf àbon droit; qui ne commettent pas de fornication – car quiconque fait cela encourra une punition et le châtiment lui sera doublé, au Jour de la Résurrection, et il y demeurera éternellement couvert d’ignominie; sauf celui qui se repent, croit et accomplit une bonne œuvre; ceux-làAllah changera leurs mauvaises actions en bonnes, et Allah est Pardonneur et Miséricordieux. (Coran,25:68-70)
Allah le sait mieux.
Source:
Islam Q&A